Poésie 12

C'était bien lui, ce fou, cet insensé sublime
Cet homme meurtri que tes rêves ranime
Un jour vide, un jour triste, un jour pâle, un jour nu
Comme un jour de jeûne, d'abstinence où l'on ne semble revenu

Sois l'astre de ma muse, et préside à mes vers
Comme toi, mon sujet embrasse l'univers
Quelles pensées fières de vaillance et de gloire
Sont inscrites tragiquement dans ma mémoire

Brillant écoulement de sa gloire immortelle
Comme elle inaltérable, et féconde comme elle
Vous croyez en l'amour dont l'âpre feu vous presse
Mais la fleur que vous brisez soupire avec ivresse

Vous rêvez d'une danse funèbre et monotone
Vous rêvez dans les brouillards d'automne
Eternité de l'homme, illusion ! chimère !
Il n'a point eu d'hier, ce fantôme éphémère

De mes ans impurs, taciturne et funèbres
Ma vie est un blason sur des murs de ténèbres
Comment de nos soleils l'inégale clarté
S'abrège dans l'hiver, se prolonge en été

Sous le masque froid des ondes déployées
De beaux rêves déçus, d'illusions noyées
Imagination réveillée et hantée de remords
Rêves nocturnes où l'on voit danser les morts

Sur le bois dolent de carmin et de roux ponctué
J'ai vu cloître ton coeur mort en mon coeur tué
J'élève mon regard vers la voûte azurée
Où nagent les astres dans la nuit éthérée

La mort m'entoure en vain de ses ombres funèbres
Mais ma raison voit le jour à travers ces ténèbres
Avant de nous entrer dans l'âme il nous effleure
Et une fois pénétré et brisé viennent les pleurs
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